Pourquoi le planeur avance t'il?
C'est bien joli de
dire qu'il est impératif que le planeur possède un certaine vitesse par rapport
à la masse d'air qui l'entoure, mais pourquoi avancerait-il, puisqu'il n'est
muni d'aucun moteur ?
Jusqu'ici, on s'est
surtout préoccupé de la portance, qui, dirigée vers le haut, tend à compenser
le poids. Mais rappelez vous, nous ne vivons pas dans un monde simplifié, et un
planeur est victime de sa traînée, qui agit comme un "frein" sur le
planeur. Et cette force, qui plus est dirigée vers l'arrière, c’est à dire
s'opposant à l'avancement du planeur, dépend du carré de la vitesse.
Donc à priori, tout
s'oppose à ce que notre pauvre planeur avance, ce d'autant plus qu'il essaye
d'accélérer.
La solution : perdre
de l'altitude.
Pourquoi ? Il y a deux façons d'expliquer pourquoi cela marche.
•
La première se base sur l'étude des forces : pour qu'un système soit en
équilibre, par exemple un planeur en ligne droite à vitesse constante, il faut
que la somme de toutes les forces qui lui sont appliquée soit nulle (principe
de l’inertie = 2eme loi de NEWTON).
Dans notre cas, on ne peut pas
changer grand chose à l'orientation du poids, mais portance et trainée
dépendent de l'orientation dans l'espace du planeur.
Prenons
une feuille et un crayon ; dessinez les trois forces sous formes de trois
vecteurs ; d'abord le poids, puis la portance orientée vers le haut (norme à
peu prés égale au poids), puis la traînée, environ 5 fois plus petite que la
portance pour que cela soit représentatif, et normale à celle-ci, vers
"l'arrière". Puis faites la somme vectorielle. Pas de bol, elle n'est
pas nulle ? Alors recommencez à coté en vous débrouillant pour que ça colle.
Comment avez-vous fait ? Vous avez "incliné" la portance vers
"l'avant", ce qui revient à incliner le nez du planeur vers le bas :
le planeur descend !
Mais
attention, l'incidence de l'air n'en est pas pour autant négative, un profil
marche normalement à des incidences légèrement positives. En fait, la vitesse
n'est pas tout à fait parallèle au fuselage, donc les filets d'air attaquent
l'aile avec un angle plus fort qu'il n'en à l'air.
• La seconde
explication se base essentiellement sur un "bilan énergétique".
Le planeur, quelle que soit la phase de vol, possède une énergie cinétique, proportionnelle au carré de sa vitesse, et une énergie potentielle (de pesanteur),
proportionnelle à son altitude.
Ec
+ Epp = constante = ½ mv² + m.g.z
Donc quand on augmente la vitesse,
on augmente l'énergie cinétique, et quand l'altitude croît, l'énergie
potentielle croît. Et on peut passer de l'une à l'autre forme d'énergie sans
arrière-pensée. Dans ce cas idéal, qui a l'altitude peut avoir la vitesse, et
celui qui a la vitesse peut toujours la transformer en altitude.
Mais là encore, il va falloir tenir
compte de la traînée. Sans la trainée, et la portance compensant exactement le
poids, le planeur idéal serait un système conservatif (la somme des forces
étant nulle, le travail de la résultante est nul). Il suffirait alors de
placer, par un quelconque moyen, le planeur à une altitude et une vitesse
données, et le vol ne s'arrêterait plus : en perdant de l'altitude on pourrait
gagner de l'énergie cinétique, c'est-à-dire de la vitesse, pour à tout moment
retrouver cette altitude et cette vitesse. C'est là l'intérêt entier du vol à
voile qui en prendrait un sérieux coup...
Mais dans notre cas, loin d'être
idéal, les frottements "travaillent", c’est à dire qu'il consomme de
l'énergie en quelque sorte. Le planeur n'est plus alors un système conservatif,
et son énergie totale diminue inexorablement sans aide extérieure.
Mais
examinons des cas pratiques.
Dans un premier temps, on décide,
par un quelconque moyen, de ne plus perdre d'altitude : en fait, on fixe
l'énergie potentielle. Les frottements consomants de l'énergie, ils vont la
prendre là où ils peuvent : seule l'énergie cinétique est disponible.
Ponctionnée en continu, celle ci diminue, c'est à dire que la vitesse diminue.
Or on a montré que la portance à besoin de vitesse pour exister. On diminue
donc la portance, et à force le planeur ne va plus voler, n'ayant plus sa
vitesse.
En fait, le moyen pratique pour arriver à cette situation n'est pas si
quelconque que ça : pour que la portance reste suffisante, on
"remplace" la vitesse par plus d'incidence (voir plus haut). Mais le
problème, c'est que l'on augmente aussi la trainée, et la vitesse diminue
encore plus vite ! Dans tous les cas, on arrive à une situation dans laquelle
l'aile ne fait plus le travail qu'on lui demande, porter, et le planeur ne peut
plus voler : c'est le décrochage,
dont il sera question plus tard. Une fois l'incidence limite atteinte, la
portance "disparait" d'un seul coup, et le planeur semble tomber.
Bref, ça n'est pas la solution pour voler...
Dans un second temps, on recherche
la situation précédente : un vol en ligne droite, à vitesse constante,
c'est-à-dire que l’énergie cinétique est constante. Et l'on refait le même
raisonnement : les frottements consomment de l'énergie, ils vont la prendre là
où ils peuvent : seule l'énergie potentielle est disponible. Ainsi sans cesse
avalée, celle ci diminue, c'est à dire que l'altitude nécessairement diminue.
Par contre rien ne s'oppose à ce que le planeur continue de voler si ce n'est
une rencontre inopinée avec le sol... Finalement, l'air de rien, on a retrouvé
le fait que pour voler, un planeur descend nécessairement.
Alors, êtes-vous convaincus qu'un
planeur peut voler par ses propres moyens ? Enfin du moins qu'il peut
"porter" de la même façon qu'un avion.
Ma préférence pour la seconde explication, qui à première vue est plus
compliquée, s'explique par le fait que l'on peut représenter le planeur par un
système non conservatif, mais où il peut y avoir échange, moyennant une taxe
payée à la trainée, entre énergie potentielle et énergie cinétique. On peut
alors étendre son raisonnement à tout le domaine de vol !! En fait c'est le
couple altitude/vitesse qui constitue les réservoirs énergétique du planeur,
comme le sont les cuves à kérogène d'un airbus... et de même, ce réservoir se
vide au fur et à mesure, et nécessite de temps en temps un plein.
Pour un planeur, le plus rentable est de remplir par la valve
"altitude" le dit réservoir, car les frottements sont à notre échelle
indépendants de l'altitude. Si l'on fournissait beaucoup de vitesse au planeur,
on augmenterait encore plus la traînée, grande "gâcheuses" d'énergie.
De plus, en pratique, on préfère donc envoyer les planeurs haut, grâce à un
treuil ou un remorqueur, la seule limite étant la visibilité, que (très) vite à
partir du sol, les contraintes mécaniques étant trop importantes pour obtenir
les même résultats.
Donc vive l'altitude !!